Qui pourrait mieux décrire ce scélérat de Myth que Myth lui-même ? Alors laissons-lui la parole : « Avec moi, l’art du larcin s’élève au rang de chef-d’œuvre ! Je pourrais baisser vos braies et voler vos baloches sans même que vous vous en rendiez compte. Pour moi, la réputation, il y a que ça de vrai. Les tireurs de bourses traînant leurs guêtres dans les artères populeuses vous diront le contraire. Ils font leurs petites affaires sans se faire remarquer. Et pour eux, un bon voleur doit se fondre dans la masse. Mais la discrétion, je lui pisse dessus. Dans ma noble profession, je n’ai pas mon pareil et j’aime le faire savoir.
Comme la nuit dernière, dans cette taverne où l’on servait la tise de Majinoor, la ville ou j’ai grandi. Je m’en suis mis ras la gueule en beuglant mes exploits sans humilité aucune, devant une assistance d’Assanides avinés. Des histoires qui m’ont valu quantité de rires gras. Le problème, c’est le revers de la médaille. À me répandre sur mes hauts faits, j’attire les assassins comme la merde attire les mouches. Certaines de mes victimes sont susceptibles, et se faire détrousser par un gobelin vantard dévoilant des pans de leur intimité, ça les contrarie. Je me retrouve souvent avec une bande de coupeurs de gorge à mes trousses, à cavaler pour m’éviter une fin prématurée. Par bonheur, ces lourdauds ne sont pas aussi à leur aise sur les toits que votre serviteur, habitué depuis son plus jeune âge à jouer les monte-en-l’air.
En lecteur attentif, ou tout simplement physionomiste, vous savez donc que je suis un gobelin. Mais pas n’importe quel genre de gobelin. Je suis ce que certains appellent un rochassier, d’autres un grimpeur, d’autres encore une putain d’engeance. Peu importe le nom qu’ils me donnent. Marcher sur les murs est une capacité précieuse, tout spécialement quand on est collé au train par une bande de sangsues morveuses.
En ce qui concerne les joies du couple, je ne suis pas le mieux placé pour en parler. Mes relations les plus longues ont rarement dépassé le cadre du sexe tarifé, et ma face balafrée comme mes origines ne font pas de moi un candidat crédible aux épousailles. En ce qui concerne l’hygiène, je suis fait pour les baignoires comme les têtes couronnées le sont pour la misère. Vous voulez connaître le secret de ma longévité ? D’abord ne compter que sur soi, ça évite les déceptions. Ensuite, se préparer à toutes les éventualités. Si vous ne le faites pas, ne venez pas vous plaindre en cas de problème. Enfin, prendre les bonnes décisions qu’elles vous plaisent ou non, comme la fois où j’ai poussé un de mes associés dans des escaliers gorgés de tueurs elfes noirs, tout ça pour me donner quelques précieuses secondes. Voilà ! Il y en a qui multiplient les amitiés là où ils passent, moi je suis surtout doué pour motiver les envies de meurtre. À chacun son style. Les émules de taille motte me promettent une raclée mémorable et d’autres désagréments dont ils ne font pas le détail et ce ne serait pas raisonnable de m’arrêter pour obtenir des éclaircissements. N’est-ce pas fatigant d’avoir toujours à cavaler ? Un peu, oui. D’un autre côté, vous me voyez le cul vissé sur une chaise, à m’épancher sur le sens ou la beauté de la vie, entouré de ma douce et tendre et d’une chiée de morveux ? Moi non plus. Alors je vous en fais la promesse, si on se recroise un jour, je serai le même : aussi fuyant qu’une anguille et retors à souhait. Sur ce, je vous salue bien. »